Victimes sans voix : guerres, naufrages et catastrophes en RDC, les tragédies silencieuses et les deuils oubliés
L’hécatombe silencieux
La République Démocratique du Congo est un pays immense, riche en ressources et en diversité culturelle, mais aussi marqué par une succession ininterrompue de drames humains. Depuis près de trois décennies, les morts de masse rythment la vie collective : guerres meurtrières dans l’Est, naufrages tragiques sur les fleuves et les lacs, catastrophes naturelles aggravées par le dérèglement climatique et la fragilité des infrastructures. Ces morts, souvent reléguées dans les marges de l’actualité mondiale, composent pourtant une mémoire collective lourde, faite de souffrances répétées et de deuils trop vite oubliés. Depuis 1996, la RDC est le théâtre de conflits d’une intensité inégalée sur le continent. La première guerre (1996–1997), suivie de la deuxième guerre (1998–2003), puis des rébellions et insurrections successives, ont semé la mort directe et indirecte.
Environ 5,4 millions de morts sont attribués à ces guerres, selon les enquêtes de l’International Rescue Committee (IRC, 2007). Ces décès incluent non seulement les victimes des combats, mais aussi celles de la famine, des maladies et des déplacements forcés. La partie Est du pays (Ituri, Nord-Kivu, Sud-Kivu) demeure encore aujourd’hui le foyer des violences. Les groupes armés comme le M23, l’ADF ou la CODECO continuent d’y semer la terreur. En effet depuis 2020, l’intensification des massacres a fait des milliers de victimes civiles, souvent lors d’attaques nocturnes, de raids contre des villages ou des camps de déplacés d’après le rapport de la MONUSCO, 2023–2025, en 2022, par exemple, une attaque contre le camp de Savo, en Ituri, a causé plus de 60 morts parmi des familles déplacées (Reuters, 2 février 2022). En 2025, des massacres attribués à l’ADF ont fait plus de 40 victimes à Komanda selon un rapport de Human Rights Watch & UNICEF de juillet 2025.
Les années récentes ont été marquées par une recrudescence des violences, notamment avec la résurgence du M23. Entre 2022 et 2025, les offensives militaires et les représailles communautaires ont causé la mort de plusieurs milliers de civils dans l’Est rapporte l’ONU (Conseil de sécurité, rapport 2025). Les Nations Unies et le gouvernement de Kinshasa estiment qu’en 2025 seulement, plus de 7 000 morts pourraient être liés aux affrontements dans le Nord-Kivu (Rapports ONU et Gouvernement RDC, août 2025). Cependant, derrière ces chiffres, il y a des visages, des familles décimées, des villages rayés de la carte et une partie de la RDC qui vit un drame chronique qui continue de se dérouler presque à huis clos.
2. Les fleuves et lacs, cimetières d’eau
La RDCongo, traversée par le fleuve Congo et dotée de nombreux lacs, vit au rythme d’une navigation fluviale essentielle mais précaire. Depuis 2023, plusieurs naufrages meurtriers ont endeuillé le pays. En Octobre 2023 à Mbandaka au moins 52 morts ont été enregistrer lors du chavirement d’une embarcation surchargée rapporte l'Agence France-Presse, 12 oct. 2023. Juin 2024 sur la rivière Kwa dans le Mai-Ndombe 86 morts, dont 21 enfants, après le naufrage d’une pirogue motorisée renseigne Reuters dans son un article publié le 11 juin 2024, en Octobre 2024 sur le Lac Kivu, près de Goma l’association de presse parle du chavirement de MV Merdy qui a coûté la vie à 78 passagers, dans la province de l'Équateur en Septembre 2025 deux naufrages successifs ont fait près de 200 morts cumulés selon Radio Okapi. Ces tragédies révèlent l’insécurité chronique du transport fluvial congolais, causer par une embarcations vétustes, surcharge systématique, absence d’équipements de sauvetage, manque de régulation et de surveillance.
3. Quand la nature se déchaîne : les catastrophes meurtrières
Au-delà des guerres et des naufrages, la RDC est également frappée par des catastrophes naturelles amplifiées par la pauvreté et le manque d’infrastructures. En Mai 2023 à Kalehe dans le Sud-Kivu des inondations et glissements de terrain ont causé 350 à 400 morts, un des pires drames naturels récents. Dans la même province du Sud-Kivu à Bukavu près de 40 personnes périssent dans des inondations en décembre de la même année, au Kwilu un glissement de terrain emporte une douzaine de vies l’année suivante. Toujours dans la province du Sud-Kivu et les provinces voisines, de fortes pluies et crues destructrices cause la mort de plus de cent personnes la plupart issues de même familles. Ces catastrophes, bien que « naturelles », deviennent des drames collectifs parce que les communautés sont dépourvues de systèmes d’alerte, d’aménagement urbain adapté ou d’assistance rapide.
L’accumulation de ces drames pose plusieurs questions : pourquoi tant de morts passent-ils presque inaperçus, Pourquoi une telle banalisation de la tragédie, répétition des massacres et des naufrages comment comprendre une telle lassitude collective. L’insuffisance des politiques publiques, peu d’efforts structurés pour sécuriser le transport fluvial, un manque de renforcement des infrastructures contre les catastrophes, ou un refus complice de protéger efficacement les civils dans l’Est.
Cependant, chaque mort anonyme nourrit pourtant un deuil collectif. Derrière chaque chiffre, il y a un enfant, une mère, un père, un grand parent dont la disparition laisse un vide irrémédiable. La République Démocratique du Congo ne peut pas rester prisonnière d’un cycle de tragédies sans mémoire ni justice. Les millions de morts des guerres, les naufrages qui engloutissent des familles entières, les catastrophes naturelles qui emportent villages et espoirs, tout cela compose une histoire nationale écrite dans le sang et les larmes. Pourtant, trop souvent, ces drames sont effacés des mémoires collectives, réduits à des chiffres froids dans des rapports, oubliés sitôt les projecteurs médiatiques éteints. Ainsi nous devons reconnaître que chaque victime anonyme est une vie unique, une voix étouffée qui aurait dû compter, refuser la banalisation de la souffrance et rappeler au monde que la RDC n’est pas condamnée à être le théâtre permanent de l’indifférence, aussi, reconnaître la responsabilité partagée, celle des autorités politique et administrative qui doivent protéger les citoyens, mais aussi celle de la communauté internationale, prompte à condamner ailleurs et trop souvent silencieuse face aux tragédies congolaises.
Il est important de souligner que la mémoire seule ne suffit pas, elle doit s’accompagner d’une volonté de justice transitionnelle. Cela signifie enquêter sérieusement sur les massacres, rendre visibles les crimes de guerre, donner la parole aux survivants, restaurer la dignité des familles endeuillées, et construire des mécanismes de réparation. Sans vérité et sans justice, les morts resteront sans sépulture symbolique, et les vivants, prisonniers d’un cycle de violences répétées. L’heure est venue pour notre nation de transformer ses deuils oubliés en un socle de reconstruction morale et politique et cela exige des institutions fortes, des politiques publiques pour sécuriser les transports et prévenir les catastrophes, mais aussi des espaces de mémoire et de justice où chaque victime trouve enfin sa place et ou chaque auteur des violations des droits et des principes sera jugé et condamné et ainsi la mémoire de ces milliers connaitra la justice. Car un peuple qui oublie ses morts est condamné à répéter ses tragédies. Mais un peuple qui honore ses victimes et réclame justice ouvre la voie à un avenir de dignité, de paix et de résilience.
👌 nous sommes fatigué compter les morts en RDC. Il faut que ça cesse. La guerre ne construit pas un pays, mais elle le détruit. Exigeons la paix.
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